Ma patiente est étudiante, elle a 22 ans et depuis qu'on lui a arraché les dents de sagesse, il y a 5 ans à la fin de son traitement ortodontique, sa mâchoire craque fortement quand elle ouvre et ferme la bouche. Je lui demande d'ouvrir la bouche. Moi je n'entends pas de bruit, mais je vois le ressaut de son menton,

un coup à gauche, puis un coup à droite ; l'inverse quand elle referme la bouche. Je l'ai soigné une fois en ostéopathie il y a un mois. Elle me dit avoir été améliorée quelques jours. Je refais le traitement ostéopathique. Quand je pose mes mains sur les deux branches montantes de sa mâchoire et que je lui demande d'ouvrir la bouche, je sens un premier ressaut à gauche puis un gros « glong » à droite. Impressionnant et je suppose inconfortable. Elle me dit que l'opération ayant consisté à lui arracher les dents de sagesse s'était très bien passé, pas spécialement traumatisante.
Elle évalue l'intensité du craquement à 9 sur 10.
« Même si j'ai ce craquement dans la mâchoire quand j'ouvre la bouche, je m'accepte complètement... » Taptaptap...

Je lui demande d'ouvrir et de fermer la bouche. L'intensité du craquement dans la mâchoire est inchangée ) 9 sur 10.

« S'il y avait une cause émotionnelle à ce problème qu'est ce que ce serait ? »
Comme prévu, elle réfléchit et répond : « Rien, tout va bien...à part une déception sentimentale il y a 2 ans... Non, je n'ai subi aucune violence, aucun accident... Mais à cette époque là... mes parents ont divorcé ». Bon comme toujours, ce qui s'est passé ne semble jamais suffisamment important pour retenir immédiatement l'attention.

La mâchoire sert à mordre pour s'approprier la nourriture. Symboliquement, certains proposent que tout problème de mâchoire et de l'articulation temporo maxillaire en particulier, reflète un conflit de « je n'arrive pas à attraper... ».

« Auriez vous voulu empêcher le divorce de vos parents ? »
Tranquillement elle répond que « non la séparation était inévitable, ils ne s'entendaient plus, je comprenais qu'il fallait que cela finisse ».
Je lui demande de dire tout haut : « la séparation de mes parents me dérange ». Puis de me préciser de 0 à 10, à combien elle évalue le « dérangement ». Elle me répond que cela dépend, si elle pense à sa mère cela ne la dérange pas mais que si elle pense à son père... Et elle fond en larmes.

 
Donc s'ensuivent !
« Même si je me sens mal parce que mon père est malheureux, je m'accepte complètement.
Même si je voudrais être plus prés de mon père pour le soutenir, je...
Même si je voudrais passer plus de temps avec mon père mais il est loin...
Même si je devrais appeler mon père plus souvent, je ...
Même si mon père a besoin d'aide car il y a tellement de choses qu'il n'arrive pas à faire seul... je...»

Taptaptap...

Nous avons passé la demi heure d'après à explorer les relations sauveteur-victime (voir « le triangle du drame », les articles de Lynne Forest, que j'ai traduit et rangé dans « Bibliothèque ») qu'elle entretient avec son père. Nous insistons sur la distinction entre l'aide qu'apporte le sauveteur, et qui prive la victime consentante de sa capacité à s'occuper d'elle même, et la solidarité appropriée qu'on devrait avoir entre nous.

Nous rappelons que à l'instant ou le sauveteur veut sortir du triangle, la victime la culpabilise et rejette la faute de ses problèmes sur lui, il faut qu'elle s'y prépare (voir articles).

Je lui demande de retester le craquement. Elle le cote à 5 sur 10. Il me semble à moi, que le mouvement de latéralité s'est beaucoup atténué.

« Même si j'ai ce craquement dans la mâchoire quand j'ouvre la bouche, je m'acc...
Même si j'ai l'impression que quelque chose n'est pas à sa place dans ma mâchoire, je... »

 
Elle ouvre et ferme la mâchoire, et réévalue le craquement à 4 ou 4 et demi. Elle signale qu'elle ne sent plus le craquement à la fermeture de la bouche mais seulement à l'ouverture.

Âpres m'être assurée qu'elle allait bien, nous avons conclu la consultation. Je lui ai proposé de revenir dans un mois afin de tenter d'amener le problème à zéro.